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vendredi 29 octobre 2021

Le blues de la caisse automatique

Ce conte est d'abord une histoire vraie, et pour cause, je l'ai vécu.

Depuis peu, je remplace le déodorant par une moitié de citron vert. Plus naturel et Ô combien efficace. 

Le blues de la caissière, c'est ce que je ressens très fort ce matin là en m'arrêtant dans la grande surface jouxtant mon lieu de travail. Il est 09h00. Je m'arrête pour acheter un petit citron vert. 

J'entre et me rends au rayon fruits. Je découvre au passage ces rutilantes caisses automatiques qui paraît-il permettent d'aller plus vite sans adresser un traître mot à quiconque.

Le magasin vient d'ouvrir, le responsable doit être affairé dans l'angle mort d'une caméra fouillant le dédale de rayons comme une affamée.

Tout se fera silencieusement sans se parler. C'est le progrès en marche à n'en point douter.

Ca y est le citron est choisi, il est au chaud dans la paume de ma main gauche.

Le monsieur qui installe le magasin est une dame. Je la connais. Habituelllement caissière, elle semble avoir pris du grade. Elle approche et m'explique le protocole à suivre, s'aidant d'un bout de papier noirci de pattes de mouches. Elle a l'écriture agitée. Epileptique.

"Allez choisir votre citron"

"C'est fait, Madame"

"Bon et bien pesez-le sur la balance de la caisse automatique.. Ici vous voyez ?"

Ensuite, je n'aurai qu'à suivre les étapes parfaitement indiquées sur une pancarte du meilleur effet. Fléchée pour ainsi dire.

Le temps des amabilités, il est 09h02.

Je pose le citron sur la petite balance de la caisse mais l'écran s'est assoupi. Il n'affiche que le reflet sombre et marécageux de ma main lui tendant fébrilement ma carte.

La dame est de nouveau affairée dans la remise. Le magasin vient d'ouvrir.

La voilà qui revient.

Elle essaye à son tour mais en vain, jure

(c'est pas beau de jurer)

Elle me conseille la caisse automatique d'à côté

(il y a déjà 4 caisses monolithiques à la queue-leu-leu).

Je soupèse le fruit. Serait-il défendu ?

Il est 09h04.

Le ticket sort, tout se passe bien jusqu'au règlement. Je glisse la carte. Néant. Aucune réaction. le lecteur à CB semble lui aussi mal embouché ce matin.

La dame revient, d'un pas toujours plus alerte, me demande de la suivre vers les anciennes caisses, on parle de celles qui demandent une intervention humaine, qui ont eu le temps d'être domestiquées .

Il est 09h06.

Problème : elle n'a pas les clés. Normal, on n'utilise plus ces caisses-là. Retour vers la remise.

09h07

Et moi et mon citron vert dans la main. Une mouche vole. Elle revient, brandissant le précieux sésame.  Je lui souris. Elle soupire.

A ma montre, il est 09h09.

Soulagement. Elle ouvre la caisse, s'empare de ma pièce d'un euro, me rend la monnaie en pièces jaune. Je repars avec mon citron.

Voilà. Je viens de décrire un achat qui depuis la nuit des temps durait 3 secondes sur un marché, chez l'épicier, avec un échange, un sourire, une poignée de main, des nouvelles et j'en passe...  

En repartant il est 09h10.

Et je me dis alors en souriant à l'asphalte qui défile sous mes pieds : le voilà, tiens, le progrès.

Il y a de quoi se pincer !

mardi 26 octobre 2021

Son nom est peut-être...

Vous avez peut-être entendu parler du "maquis".

Le maquis, c'est une page sombre de l'Histoire Camerounaise. Quelques années avant l'indépendance - qui n'en fut évidemment pas une. Ahidjo placé à dessein au pouvoir pour faire oublier d'autres noms, ceux des vrais héros vite oubliés de l'Indépendance. Dans une forêt d'inextricables symboles, de contradictoires destinées, où le napalm arrache jusqu'à la vie du nouveau né dans un silence d'église, l'indifférence onusienne fait loi, la version officielle fait son office, protège les intérêts français, la "real-politique" est déjà le seul langage qui vaille... La loi du plus fort, instrumentalisons l'autre, retournons-le contre ses frères, faisons naître la paranoïa dans le taxi qui t'amène en ville, sur le marché de ton village, lorsque tu croises les amis aux champs... Glissons subrepticement des rats dans vos têtes. Fissurons la confiance, piétinons les modèles, tuons le courage, détruisons l'espoir.

Ruben Um Nyobe et ses frères d'héroïsme assassinés ? Qui croire dès lors ? Comment oser ? A qui se confier ? Comment résister lorsque l'Histoire est aussi oublieuse, indifférente ?

L'un dénonce l'autre pour se venger, qu'il soit de mèche avec l'occupant ou en cheville avec le résistant. On profite du chaos pour régler des comptes, le vice y tue la vertu. Tout doucement. Sans faire de bruit.  Sauve qui peut. Lorsque son propre voisin, sa soeur de lait, n'est plus digne de confiance, chacun est alors ramené à l'état de survivance, une possible folie ordinaire où le seul refuge devient une impénétrable forêt. Mère des instants difficiles qui protège, berce et nourrit. L'on s'éparpille, l'on se veut être le héros pour sa famille, on promet de protéger ses parents, les sauver du danger quand la menace gronde, même si l'on mesure 3 pommes et que l'on pèse 1 plume. Période où l'orgueilleux se livre aux forces du mal, où les mythes naissent de la bouche à l'oreille sur les rebords escarpés d'une falaise en emportant avec soi qui le colon, qui le bourreau.

Voilà ce que fut le maquis. Se battre contre le blanc, contre l'oppresseur, contre ceux des tiens qui y voient une opportunité de grandir à l'ombre de l'occupant. Alors on n'a plus personne auprès de qui se rassurer, on ne fait plus confiance à quiconque, on s'improvise.

C'est dans ce climat que Peutêtre est né. Peutêtre est le premier enfant de Ladouce. Ladouce a essayé en vain mais en vain l'enfant n'est jamais venu jusqu'à Peutêtre. Peutêtre était baptisé ainsi pour espérer qu'un jour peut-être il serait là. En chair et en os. Qu'il vivrait assez longtemps pour prendre soin de sa mère pour l'accompagner un jour vers sa dernière demeure.

Peutêtre est le fruit d'un amour total, et finalement trop grand peut-être. Le ventre de Ladouce a n'a fait que grossir au fur et à mesure que son fils prenait sa place.  

Sortir du ventre a été une interminable et pénible négociation. Un dialogue passionnant. Cart tant que Peutêtre était dans le ventre, Ladouce lui parlait comme à une personne qu'on accueille au monde. Maintenant qu'il est à l'air libre, Ladouce a changé de comportement, le sur-couve, préférant ne pas couper le cordon. Alors, partout où il va, ce cordon l'enserre, et lorsqu'il fleurte avec les frontières du village, il sent comme le lien se resserre, retenu par ce long cordon qui ne le lâche jamais. C'est plus fort qu'elle. Il est sorti de son ventre mais pourquoi le laisser partir ? Il lui appartient. Il est une partie d'elle.

Et puis la période est dangereuse le péril au coin de chaque rue. Elle a trop peur qu'il ne lui arrive quelque chose. Un malheur est si vite arrivé.

Le cordon est devenu vivant, un serpent, un boa constricteur qui l'étouffe d'amour protecteur. Une malédiction.

Peutêtre sait qu'il doit trouver la parade. Il sait se montrer patient. La longue gestation dans e ventre de sa mère le lui a enseigné. Pas de précipitation. Attendre le bon moment.

Un jour qu'il s'aventure au Bord du lac, où personne n'ose s'aventurer d'ordinaire, car l'esprit des eaux y effraye le petit monde Bamileke qui vit sur ses collines et redoute plus que tout au monde lacs, rivières et leurs mystères, leurs dangers.

Peutêtre a repéré en rentrant de l'école ce poisson rouge prisonnier d'un sac de plastique sous le cagnard sur le bord de la route qui mène à Bafoussam. Il s'empare du sac et de son occupant et file jusqu'au lac.

La dame du lac lui apparait et le remercie d'avoir rendu sa liberté au poisson rouge.

Elle lui propose de réaliser un voeu. Un seul.

"Je veux voler de mes propres ailes

Elle le remplace au bout de ce cordon. Par un mannequin tissé de raphia pesant le même poids qui lui ressemblera comme deux gouttes d'eau et qui dira oui, amen à tout ce que lui dira sa maman.

La Dame du lac s'exécute, la mère possessive n'y voit que du feu, heureuse d'avoir cet enfant soumis et en permanence auprès d'elle, sans volonté, disant "amen" à tout.

Pendant ce temps, Peutêtre est déjà très loin, il a franchi les collines verdoyantes, les lacs, les montagnes, les cascades, il vient d'arriver à Douala la rebelle. Il est à l'entrée du pont de la Dibamba. Il trépigne, il exulte.

Il vient de vivre son maquis intime. Contre l'ordre établi. A sens "inique".

Il va entrer dans l'Histoire, dans son histoire. La vie lui appartient.

Peutêtre est devenu un homme. 

dimanche 24 octobre 2021

Le Firmament ! Ou la revanche des espèces invasives

Les humains avaient pris leurs marques. Leur monde s'était calqué sur le modèle capitaliste cherchant sa vérité partout et nulle part pour gagner du terrain sans savoir où ce dernier finissait. Gagner du terrain sur qui ? sur quoi ? Mystère... Surpopulation, Surexploitation des ressources, se contredisant, se contrefaisant, métastasant le réel, l'adversaire, le rival, l'idéal pour régner sans partage. Avalant tout. Goulument. Sans réfléchir. 

La politique s'était calée sur le marketing. Le marketing s'était calé sur la division du travail. Chacun s'était soudain mis à réclamer une meilleure représentation de sa propre petite communauté de vie... Eut-t-elle été toute riquiqui. Le retour à la moindre minorité qui faisait sens, qui créait une valeur nouvelle, se disait "marché", se faisait docilement marchandise.

On usait d'allégories, de métaphores pour décrire le vivant face à l'inextricable mystère de la nature.

Et voilà qu'on mettait soudain, côte à côte, pied à pied, le daltonien ambidextre, le manchot homosexuel, le transformiste à pieds plats etc. A l'adolescence, les moches décidèrent de se pourvoir en justice pour faire valoir leur droit à ce que les jolies filles et les beaux garçons leur accordent un tant soit peu d'intérêt. Ils se sentaient lésés et gagnèrent nombre de procès, eurent gain de cause et obtinrent réparation devant l'humiliation vécue tant de fois face aux "beaux" qui dictaient honteusement leurs lois pour le marché.

Tout le monde valait tout le monde, chacun méritait ce que l'autre avait déjà, et donc l'impossible arriva. Fatalement. Et les choses prirent une tournure pour le moins inattendue.

Ce que chacun ignorait, c'est qu'Il existait un royaume qui se situait dans les nuées. Ce royaume était au très haut dans le ciel au point que même depuis le sommet de la plus haute des montagnes terrestres, on ne pouvait l’apercevoir. Cet endroit se nommait le Firmament, c’était le refuge de toutes les créatures merveilleuses qui avaient autrefois été sauvagement chassées par les hommes. Dans ce royaume bien au-dessus des nuages, il faisait toujours beau, il ne pleuvait jamais.

Contrairement à la Terre, la paix régnait partout au Firmament grâce à des règles instaurées par les Guides. Les Guides étaient les premiers arrivants sur Firmament. C'était d'anciens Dieux issus des religions polythéistes oubliées. Ils vivaient dans un gigantesque palais au beau milieu du royaume, ce palais était fait d’or et de marbre. Il y avait des créatures en tout genre à Firmament (elfes, fées, sorcières, sirènes, dragons, lutins, morts-vivants, etc...). Là-bas tout le monde (même les animaux) étaient égaux il n’y avait aucune discrimination toutes les monde était Vegan, ce qui évitait beaucoup de souci pour les animaux. Mais malgré toutes les libertés qu’offrait ce royaume il y avait trois lois qu’il fallait impérativement respecter sous peine de mort en cas de désobéissance :

1 Aucun humain ne devra découvrir l’existence du royaume 2 Aucun humain ne devra découvrir l’existence du peuple de Firmament. Peu importe son origine . sirènes, dragon, etc... 3 Aucun humain ne pourra survivre sur Firmament.

Soudain les vampires albinos, les lycanthropes à yeux vairons, les mutants autistes sur Firmament trouvèrent dans ce qui se tramait sur Terre quelque chose de familier, un je ne sais quoi qui leur parlait... Ce qu'ils y trouvaient de stimulant l'emporta sur les règles immuables de Firmament. Il suffit parfois d'un inconscient pour écrouler le plus stable et le plus confortable des édifices. Les plus téméraires (les plus fous de colère ?) décidèrent de faire leur coming out poussés par une soif de vengeance inaltérable contre le genre Humain : ils s'étaient sentis ostracisés, rejetés, maltraités, humiliés depuis trop longtemps par les Hommes, tout ce que l'art humain avait moqué de leur existence, tissant une mythologie monstrueuse, une fois ces créatures disparues de la surface de la Terre.

En descendant sur Terre, ils réalisèrent que les règles du Firmament n'étaient que la traduction de valeurs, de codes d'honneur, d'une sagesse millénaire pressentant la catastrophe qui s'annonçait si les uns et les autres faisaient enfin connaissance pour le meilleur mais surtout pour le pire... Découvrant que les Guides étaient dans cette incapacité de mettre à exécution les menaces que faisaient peser les 3 règles fondamentales de Firmament sur leurs habitants, ces derniers décidèrent comme un seul Homme de retourner sur Terre pour en découdre. Les Guides ne purent que constater à leur immense détresse cette fuite incessante de la terre des cieux vers celle de Hommes.

Brutale révélation à la face du monde. Tous ces personnages prétendument imaginaires existaient bel et bien mais n'avaient jusque là pas ressenti la nécessité de se faire remarquer. D'affirmer ouvertement leur appartenance hors la majorité, leur identité contre les autres. Redevenus mortels, ils revendiquaient soudain (comme chaque petite communauté humaine sur Terre) leur droit à exister même différemment... C'était le pot aux roses. Leur révolution, découvrant qu'ils étaient tout aussi légitimes que le commun des mortels.

Tous ces nouveaux vivants déréglés comme profitant du dégel, du réchauffement climatique pour revenir aux affaires, furent bien aise de profiter de ce que le cinéma et la littérature s'étaient évertués à faire d'eux d'innommables monstres sanguinaires pour assouvir leurs plus bas instincts... Ils eurent la riche idée de réclamer dommages et intérêts et obtinrent gain de cause, se pliant dans un premier temps aux règles en vigueur sur la Terre et purent faire interdire Frankenstein, faire condamner à titre posthume Mary Shelley et autres auteurs racistes et malveillants qui les avaient traîné dans une boue infâme ...

Naturellement, ils s'aperçurent très vite de leur supériorité (physique particulièrement) sur le reste du vivant et en firent usage. Vampires, Dragons, Sorcières, Morts-Vivants, Lycanthropes et Mutants s'allièrent pour asservir l'humanité considérée comme néfaste et qui n'eut dès lors plus que ses yeux pour pleurer. La loi du plus fort finit toujours par être la meilleure. Firmament fut désertée mais hélas personne n'avait prédit que la Terre déjà mise à mal finirait par imploser, mourir (et tous ses habitants avec, réels ou imaginaires) sous l'effet d'un surpopulation mortifère...

En matière de Capitalisme, tout est mal qui finit mal... A trop chercher de nouveaux marchés, de  fantastiques débouchés innovants, d'énièmes  micro-niches susceptible de "cracher" de l'argent frais, on finit par créer les conditions de sa propre perte. A bon entendeur...


La disparition mystèrieuse de Mascotto Biscoto

La mascotte de la Coupe du Monde 2038 au Maroc a disparu. Qui sont les responsables ? Qui a commis cet acte ignoble ? Où est-elle passée ? L...